– Putain de machine de merde.
Le distributeur automatique de billets demeure insensible à l’insulte de Thomas qui essaye maintenant d’obtenir une réponse de sa part, en martelant la touche annuler. Le distributeur automatique de billets n’ouvre pas la bouche ni pour répondre à Thomas, ni pour lui rendre sa carte bleue qu’il vient d’avaler. Ce n’est pas le bon moment, si tant est qu’il y ait un moment opportun pour se faire aspirer sa visa mais, dans le cas de ce jeune homme de 27 ans qui doit payer son loyer depuis deux semaines et qui compte sur le découvert autorisé de sa carte pour le faire, ce n’est vraiment pas le bon moment. Mais que peut-on espérer lorsque l’on repose son ultime espoir sur un ordinateur et que l’on jette ses dernières économies dans la gueule d’une machine. Bien évidemment, personne ne répond au numéro d’assistance technique inscrit à droite de l’écran et, comme par hasard, il pleut des trombes.
– C’est peine perdue jeune homme, lance le vieillard qui fait la queue derrière lui. Il est midi, ils doivent être en train de déjeuner, allez-vous asseoir au café d’en face et attendez quatorze heures que la banque rouvre, ils sauront vous aider. C’est encore la meilleure chose à faire.
La meilleure peut-être pas, mais la seule assurément. La terrasse du café est déserte, à croire que même les clients sont en pause déjeuner. Seule une femme est assise à une table, le Canard enchaîné et un expresso dans les mains. Thomas ouvre son portefeuille à la recherche de pièces mais, comme sa carte bleue, ces dernières ne sont pas réapparues par magie. Pas le choix donc.
-Bonjour Madame. Désolé de vous déranger mais j’aurais besoin de votre aide. Le distributeur de la banque juste en face vient d’avaler ma carte sans aucune raison (menteur) et la banque n’ouvre pas avant une heure et demie. Pourriez-vous me dépanner de deux euros, que je prenne quelque chose à boire pour m’abriter de la pluie en attendant ?
-Celle-là, on ne me l’avait jamais faite, répondit la femme en rigolant et en levant sa tête du journal. J’avoue que c’est original comme phrase d’approche, même si elle ne donne pas vraiment la meilleure première image de vous.
Thomas, gêné, tente de se justifier mais la femme ne lui laisse pas le temps de répondre.
-Asseyez-vous donc, j’ai envie de savoir jusqu’où vous avez pensé à cette accroche, découvrir l’histoire qui l’accompagne. Un perrier ou un café pour vous ?
C’est seulement après cette invitation inespérée que Thomas prête attention au visage de sa bienfaitrice. Chatain, les yeux bleus, légèrement bronzée et bien plus âgée que lui, elle est jolie assurément, mais ce sont ses manières distinguées, son journal soigneusement plié, son col de chemisier bien repassé, ses bijoux étincelants de sobriété et son sourire relâché qui ajoutent à son charme. Impossible à cerner, elle fait à la fois aventurière et femme d’affaire, revient-elle de vacances ou d’un Comex ? Une chose est sûre, l’argent qu’elle a et qu’elle ne cherche pas à montrer n’en est que plus évident et Thomas se demande bien ce qu’il va pouvoir dire à cette femme d’un milieu dont il ne connaît rien. Marie, puisque les présentations sont désormais faites et qu’il s’agit de son prénom, ne connaît pas ce problème. Elle passe d’un sujet à l’autre comme elle passait d’un article à un autre il y a quelques minutes encore. Les bienfaits du véganisme sur le corps et l’environnement, son ancienne blessure à la cheville lors d’un match de tennis sur une mauvaise terre battue, la dernière expo du centre Pompidou qu’elle a vue, le premier livre d’Annie Ernaux qu’elle a lu ; ils parlent de tout et des riens qui font l’existence mais pas un mot sur leur travail. Cela fait du bien à Thomas puisque lui, du travail, il n’en a plus depuis deux mois et cela fait depuis autant de temps qu’il se justifie auprès de sa famille, de ses amis, ou même de n’importe qui, sur la difficulté de retrouver un emploi durant cette période, surtout dans son secteur. Thomas est, ou était, il ne sait plus lui-même, ingénieur automobile dans une entreprise qui fabriquait des pompes à injection pour des grands groupes. Son père travaille, lui, depuis toujours dans une usine Citroën. Il n’avait cessé de lui répéter durant toute son enfance qu’il fallait qu’il devienne ingénieur automobile pour qu’il sécurise son emploi et son dos car, selon lui, « les hommes n’ont besoin que de deux choses, un monde à découvrir et une voiture pour le parcourir. » Il avait peut-être raison, mais il n’avait pas anticipé que les voitures pourraient devenir électriques, que les nouvelles réglementations et aides accordées au développement de l’hybride et de l’électrique auraient raison de l’entreprise de Thomas. Le voilà donc au chômage, avec un diplôme qui perd de la valeur à mesure que la technologie en prend. Un loyer à payer et sa carte avalée, il l’a presque oubliée en parlant à cette femme. Rien ne paraît l’atteindre, elle parle de tous les sujets comme s’ils avaient la même importance. Elle voyage beaucoup, s’intéresse à énormément de choses, regarde intensément Thomas et l’écoute raconter son attirance pour la photographie.
La banque rouvre sans même que Thomas n’y prête attention. Marie lui parle d’arts, de philosophie, elle dit des phrases d’une autre classe sociale, d’une autre culture qui le fascinent comme : « ll faut parfois suivre son instinct sans même connaître le chemin», « J’ai abandonné l’idée d’avoir une vie stable la première fois que j’ai traversé l’Atlantique », « Moins je me pose des questions plus je trouve mes réponses ». Thomas a du mal avec ces raisonnements tout faits, tout à fait bourgeois qui ne naissent que dans des esprits libres de toute préoccupations vitales. Mais Marie lui semble si sincère et convaincue par elle-même qu’elle arrive à le faire douter. Il est vrai que pour ceux qui ont tout, il est plus simple de se risquer à une autre vie, mais il ne faut pas non plus sous-estimer la force et la liberté de ceux qui n’ont rien à perdre. Pour la première fois, Thomas prend conscience qu’il fait partie de ces gens qui ont fait tapis au mauvais moment ; plus de taff, pas de copine, bientôt plus d’appart, peu de perspectives d’avenir. Il se dit que pourquoi pas, lui aussi…
– Tu veux venir manger chez moi ? J’habite juste à côté.
Comme ça ; coupé en pleine réflexion, elle lui demande comme ça, sans doute, sans gêne, sans les justifications mensongères qui accompagnent généralement ces propositions cavalières.
– Bien sûr, avec plaisir, répond Thomas, sans même réfléchir, réjoui par la proposition.
Jamais une femme n’avait été aussi directe avec lui. Remarque, il n’avait jamais eu le besoin ni le courage d’aller aborder une femme avant ce matin. Sa carte bleue restera encore un peu au chaud dans le distributeur. De toute façon, vide, elle ne lui sert pas à grand-chose.
Image réalisée à l’aide de l’intelligence artificielle (Dalle.E 2)
Marie habite réellement la rue adjacente au café, ce n’était pas un argument fallacieux pour lui forcer la main à la suivre. Un magnifique immeuble haussmannien, avec des escaliers en marbre blanc couverts d’un tapis de velours rouge, qui compressent un petit ascenseur. Thomas avait eu tort, Marie n’est pas plus riche que lui, elle l’est immensément plus. Son appartement se compte en centaines de mètres carrés, les murs aux moulures de plâtres sont recouverts de tableaux, de photos, d’œuvres rapportées des quatre coins du monde et le plancher de parquet vernis est caché par de magnifiques tapis marocains, persans, japonais. Marie le fait entrer comme s’il s’agissait d’une habitation des plus classiques. Elle ne se vante de rien, ne lui dit pas même les noms des peintres, des artistes, des designers, que Thomas devine compliqués et inconnus de lui. Ils vont directement dans la cuisine sur mesure, ce que Thomas remarque à l’agencement des meubles dans les murs et les recoins de la pièce, comme dans un moteur de voiture, tout est à sa place. Plus que tout le mobilier, les magnifiques œuvres, c’est l’énorme frigo américain avec distributeur de glaçons et d’eau qui s’ouvre comme les portes d’une salle de banquet, qui finit d’achever Thomas. Depuis qu’il avait vu un frigo de ce type au domicile d’un ami lorsqu’il était petit, cela était devenu pour lui un indicateur fiable du niveau de richesse de ses hôtes.
Ils continuent de parler de leurs points communs dans cette cuisine qui ne pourrait pas être plus étrangère à Thomas, pendant que Marie coupe des légumes et prépare une quiche. Bien qu’il ait le ventre vide, Thomas se demande maintenant si elle ne l’a pas invité uniquement par pitié, pour le nourrir et pour parler.
– Hop, au four pendant quarante minutes. Ça devrait nous laisser le temps de faire l’amour une première fois, non ?
Deuxième choc pour Thomas qui comprend qu’il s’agissait visiblement d’une question rhétorique, puisqu’elle quitte déjà la cuisine en direction de l’immense canapé du salon. Ils font l’amour rapidement, presque violemment, comme deux amants qui se retrouveraient après une longue absence. Dans le domaine du sexe, là encore, Marie semble en connaître bien plus que Thomas et c’est le visage rosé de sang et d’excitation passée qu’ils rejoignent la cuisine pour manger. À la fin du dessert, ils refont l’amour tout aussi passionnément, le repas n’ayant pas duré assez longtemps pour qu’ils oublient le corps de l’autre. Ils parlent, rigolent. Deux amis de toujours qui viennent de se rencontrer. Le soir, la carte bleue avalée est totalement sortie de l’esprit de Thomas, entièrement occupé par Marie. Elle commande le dîner car « J’aime bien cuisiner, sauf quand il y quelque chose de plus important à faire », et ils refont l’amour en attendant le livreur.
Le rideau est tiré, les rayons du soleil tombent sur la couette blanche, Thomas se réveille. Marie n’est plus là. Ni dans le lit ni ailleurs. Quelle personne est assez folle pour laisser un inconnu chez elle, surtout dans un appartement comme celui-ci ? En bon pragmatique, Thomas tente de trouver une explication qui entrerait dans sa logique. Elle est sortie acheter quelque chose et devrait revenir bientôt, elle a changé d’avis et a appelé les flics après l’avoir découvert dans son lit ce matin, c’est une nymphomane mythomane psychopathe cambrioleuse et cet appartement n’est pas le sien et cette vie n’est pas la sienne.
« Merci pour hier, je n’aurai jamais cru qu’un homme avec une phrase d’accroche aussi bancale puisse autant se rattraper. J’ai des rendez-vous importants aujourd’hui, sers-toi dans la cuisine pour le petit déjeuner. 06 ** ** ** **, à bientôt. »
« Quelle phrase d’accroche bancale ? », se demande Thomas, vexé, en reposant le post-it sur la table de cuisine.
« Ah oui, ma carte bleue, elle pense que je mentais. Ah merde ma carte bleue. » Une heure plus tard, Thomas a quitté l’appartement, récupéré sa carte bleue à la banque en n’oubliant pas d’envoyer une photo de cette dernière à Marie pour qu’elle comprenne qu’il ne s’agissait pas d’une technique de drague. Pas de réponse de sa part.
Image réalisée à l’aide de l’intelligence artificielle (Dalle.E 2)
Pendant deux jours.
***
« Alors finalement ce n’était pas un mensonge. Je viens de voir la photo de ta carte bleue, j’en suis presque vexée, je tenais mon charme irrésistible pour responsable de notre rencontre. Mais le moment que l’on a passé ensemble t’excuse largement. J’étais très occupée ces deux derniers jours car je pars demain au Brésil. Si tu le souhaites, tu peux m’accompagner, je me rappelle que tu as toujours voulu voyager. Je n’ai pas encore de date retour, mais si tu viens je te prends ce soir ton billet, sur place tout est déjà organisé, aucun risque de problème de carte bleue. ;) »
Thomas est depuis cinq minutes figé devant son téléphone. Quel genre de personne envoie ce genre de SMS ? Il est beau garçon, et plutôt bon au lit, mais pas au point de provoquer de telles réactions et invitations. Marie serait déjà tombée folle amoureuse de lui, tellement qu’elle voudrait l’inviter à l’autre bout du monde ? Cela semble peu probable. Thomas reste encore une demi-heure à se poser les questions que l’on s’inflige pour se persuader d’accomplir ce que l’on a déjà décidé. Il partira au Brésil avec Marie. Il n’a plus de quoi payer son appartement de toute façon, et pas une seule des entreprises auxquelles il a postulé ne l’a rappelé. Il n’a aucune perspective d’avenir, alors autant le provoquer.
Cela fait trois semaines que Thomas et Marie sont au Brésil pour leur lune de miel improvisée, Thomas découvre ce pays en même temps que sa mystérieuse bienfaitrice. Ils font l’amour jusqu’en début d’après-midi avant de partir visiter São Paulo, de manger au restaurant, de sortir danser le soir. Sur le chemin du retour, ils prennent un cornet de coxinhas dans un stand de street-food avant d’aller se coucher dans la villa qu’ils occupent sur les hauteurs de la ville, à l’intérieur d’un quartier d’expatriés et de notables brésiliens. La vie s’écoule doucement, dans cette bulle de richesse et de découvertes à laquelle Thomas s’habitue rapidement. Un hasard quotidien rythme les journées du jeune couple qui apprend à se connaître à mesure des visites, expositions, excursions, soirées mondaines auxquelles Marie est conviée. Appartement rendu, emploi perdu, Thomas s’est séparé de sa vie parisienne avec une facilité qu’il n’aurait pu anticiper. Là, avec un océan, une quinzaine de degrés d’écart, il ne pense qu’à son prochain repas, sa prochaine baise, son prochain cliché. Il n’a jamais autant photographié, l’énergie de ce pays électrise son obturateur qui, sans cesse, se déclenche. Rues, plages, soirées, jeunesse, tout vient se stocker dans sa carte SD pour s’assurer que cela est bien réel. Marie se prête au jeu qui, très vite, se transforme en passion : elle pose au bord de la piscine en chemise blanche à moitié nue, elle fait semblant d’être une passante inconnue qui aurait traversé la rue à l’exact moment où le soleil se couche. Se créer des souvenirs et les conserver : leur unique préoccupation.
Thomas tombe amoureux du Brésil en même temps que de Marie, et réalise à quel point la vie est différente avec un zéro de plus sur la fiche de paie, même si en l’occurrence, il s’agit là de plus qu’un zéro. Pourtant, ils ne font rien d’extravagant, pas d’achats de bijoux ou d’articles de luxe, pas de chauffeur, encore moins de jet privé. Simplement des restaurants, des excursions quand ils le souhaitent et, oui, une villa aussi. Les jours ne sont pas métamorphosés, ils s’écoulent plus simplement, c’est tout, dans ce milieu où la question de l’argent ne se pose plus. Ils n’ont à se soucier de rien, si ce n’est de jouir. Marie continue de le surprendre en acceptant presque toutes les opportunités qui leurs sont proposées. Un inconnu leur propose d’être leur guide pour visiter une favela, elle le suit sans poser de question – « qu’est-ce que l’on risque, à part la mort ? ». Comme toujours, tout se passe bien et Thomas fait des photos incroyables.
Depuis qu’ils sont arrivés, Marie passe des coups de téléphones discrets et périodiques qui semblent lui permettre de gérer son argent. Ce qu’elle fait, elle n’en parle pas, et Thomas ne lui demande pas d’ailleurs – « Qu’est-ce que je risque à part d’être le complice d’une criminelle ? ». De toute façon, elle est bien trop jolie pour commettre des choses sales. Thomas se laisse emporter par le courant de cette brazilian riviera, il ne cherche plus de travail. Il poste simplement, sur les conseils de Marie, ses photos sur Instagram. On pourrait croire que l’on s’ennuie, dans cette opulence de plaisirs et d’oisiveté, mais pas du tout : on s’accommode mieux de l’absence de travail que de son surplus. Toutes les photos ont beau avoir été prises, il n’en demeure pas moins qu’il faut les prendre soi-même. Toutes les positions ont beau avoir été faites, il n’en demeure pas moins qu’il faut continuer de faire l’amour. Leur nouvelle vie commune s’écoule paisiblement sur les hauteurs d’une ville bouillonnante jusqu’à cette soirée au Consulat Général de France qui met à l’honneur un jeune écrivain brésilien.
Toute la communauté française importante y est présente et, visiblement, Marie en fait partie. C’est aussi une des rares personnes à avoir lu l’auteur qui sert de prétexte à ce rendez-vous mondain. Tout le monde est présent, les journalistes, les expatriés des grosses entreprises ayant des gros intérêts au Brésil, le président de l’alliance française, le consul, la responsable des échanges universitaires franco-brésiliens, ainsi que quelques écrivains et employés du consulat. Marie semble connaître tout le monde de près ou de loin, elle déambule avec politesse entre les discussions. Elle est partout à sa place, et Thomas se demande s’il existe un milieu où elle n’est pas à l’aise alors qu’elle lui fait signe de la rejoindre en souriant.
-Je te présente Louis, il est journaliste pour le Guide du routard. Il s’occupe de mettre à jour l’édition brésilienne et a passé plusieurs jours à São Paulo.
Louis, la quarantaine, donne l’impression d’en avoir vu d’autres, des choses toutes plus exubérantes les unes que les autres, des choses qu’il ne pourrait pas dire dans ce genre de réception. Des soirées comme celle-là aussi il a dû en voir puisqu’il n’y prête qu’un intérêt modéré, seul discuter avec Marie lui redonne le sourire.
-Le Brésil a énormément changé depuis ma dernière visite. Le pays est effervescent, trop de jeunes et pas assez de croissance… À São Paulo, c’est décuplé : soit la ville va tomber dans la guerre civile, soit elle sera la nouvelle capitale culturelle de la jeunesse du monde. C’est pour ça que j’adore venir ici, tout est extrême, la violence, la vie, l’amour et même le foot. Il n’y a pas demi-mesure. Malheureusement, je n’ai pas eu le temps de tout voir et je dois repartir demain sans même avoir été dans une favela.
-Nous y sommes allés avec Thomas, on est tombé par hasard sur un guide incroyable qui a permis à Thomas de prendre des photos magnifiques.
-Tu as des photos de favela récentes ? Tu es photographe ? Louis semble soudainement revivre.
-Euh oui, répond Thomas un peu hésitant, ce n’est pas mon métier mais c’est une passion.
-Tu pourrais me les montrer ? Comme je dois partir demain, je n’aurai pas le temps de prendre de nouvelles photos pour le guide, elles pourraient m’intéresser.
-Bien sûr, avec plaisir.
Thomas n’en revient pas, il va montrer ses photos à un inconnu qui travaille au Guide du routard. Il va falloir qu’il les retouche spécialement pour lui, qu’il les trie, qu’il les organise en série… Tout cela lui prendra un ou deux jours mais il pourra ensuite les lui envoyer.
-Alors allons-y, allons voir tes photos.
Louis, plein d’enthousiasme, l’avait coupé dans sa réflexion. Thomas, pris au dépourvu, lance un regard à Marie en espérant qu’elle l’attrape.
-Allez, c’est parti, je nous appelle un taxi et on va à la maison, lance-t-elle avec un grand sourire adressé à Thomas.
Simplement, comme cela, ils quittent la soirée, avant même le discours du consul, et se retrouvent dans la villa à minuit à regarder les dizaines de photos ni retouchées ni triées de Thomas.
Louis adore les photos, et de retour en France, il les joint à ses écrits pour le routard et donne le nom de Thomas à ses supérieurs. Mais la prochaine édition du guide ne paraîtra pas avant un an, donc Thomas continue sa dolce vita brésilienne sans se soucier de l’avenir de ses photographies. Il mitraille toujours dans São Paulo ainsi que dans les alentours de la ville lors de leurs multiples virées. Un mois plus tard, Louis rappelle Thomas pour avoir de nouvelles photos : « Cette fois c’est pour la presse écrite, j’écris un papier sur les favelas après le retour de Lula et le départ de Bolsonaro. » Thomas accepte volontiers de passer une semaine de reportage dans différents quartiers de São Paulo, accompagné de l’ancien fixeur de Louis qui lui a donné le contact. Les photos sont dures à faire, encore plus à regarder, mais leur naïveté dans le chaos séduit le journal qui les publie. Elles seront reprises par d’autres médias qui, sans son accord et sans rémunération, feront entrer Thomas malgré lui dans le monde impitoyable de la photographie freelance. Peu importe, il gagne en visibilité. La publication de ses clichés, il ne s’était même pas permis de l’imaginer dans ses rêves d’ingénieur les plus fous, alors être payé pour, il ne faut pas exagérer. Louis lui passe d’autres commandes, fait circuler son nom dans les rédactions de magazines et de guides de voyage. En à peine un mois, Thomas réalise deux reportages photo à São Paulo et un à Brasilia. Avec Marie, c’est toujours l’amour juste. Avec Paris, c’est le point de non-retour. Le Brésil l’a happé, avalé et digéré, pour bientôt le recracher en photographe passionné des couleurs de ce pays. Pourtant, il aurait dû s’en douter ; il n’y a qu’à regarder le drapeau vert, jaune et bleu pour comprendre qu’ici, tout est histoire de contraste, de nuances, de tons. Puis, arrive le fameux mail, suivi des appels : le Guide du routard lui propose d’aller faire le tour de l’Argentine pour prendre des photos des nouvelles attractions touristiques. C’est un voyage de plus de trois mois avec Louis qui se chargera d’écrire les descriptions.
-Qu’est-ce que tu en penses Marie ? Je devrais accepter ?
-Tu sais déjà ce que tu vas faire. Tu le savais dès que tu as décroché le téléphone. C’est normal, c’est ta passion, ça se voit dans tes yeux, c’est le cas de le dire. Tu as d’ailleurs dû me photographier mentalement avant même de me regarder lors de notre rencontre. Il fallait simplement que les circonstances te poussent à t’extraire de tes habitudes pour te proposer un environnement propice à l’expression de tes désirs réels. Je suis contente d’avoir contribué à te donner cet environnement, cette liberté de penser, d’imaginer. Ce n’est pas maintenant et que je vais t’enlever ta liberté de mouvement. Ce que nous vivons est sublime, presque parfait, mais parfois cela ne suffit pas. Il y a des choses plus importantes pour l’un et pour l’autre que l’un et l’autre. Nous nous sommes rencontrés par hasard, quittons-nous par devoir, pour la vérité de nos désirs. Tu vas faire de magnifiques photos, je les regarderai avec attention et moi, je vais continuer à faire ce qui m’a mené à toi, peut-être que cela nous fera nous croiser encore ? Il nous reste quelques nuits ensemble, passons-les à ne pas dormir pour les bonnes raisons. Qu’est-ce que tu veux manger ce soir d’ailleurs ?
Une rupture simple, spontanée, belle, pleine d’amour comme le fut leur relation. Thomas essaye de protester, d’argumenter, mais Marie a raison sur tout, y compris sur la stupidité de se quitter en adolescents pleurnicheurs qui voient leur amourette d’été rattrapée par la rentrée. Ils s’aimeront pendant les jours qui leur restent et Thomas prendra son avion pour l’Argentine.
À l’aéroport, Marie l’embrasse comme s’ils allaient assurément se revoir. Il part comme s’il allait revenir le lendemain avec le petit déjeuner. Pour la première fois, ce fût elle qui le pris en photo au loin depuis le trottoir du dépose minute. La bonne personne au bon moment, maintenant, les bons rêves au bon endroit.
FIN
Cette nouvelle se base sur la réponse d’un intelligence artificielle (chatGPT) à la question : « Propose-moi une idée de nouvelle sur le thème du hasard ? ».
La voici :
Voici une idée de nouvelle sur le thème du hasard :
Titre : « Le hasard fait bien les choses »
Résumé :
Lorsque Thomas, un jeune homme sans grande ambition, se retrouve au chômage suite à la fermeture de son entreprise, il ne s’attend pas à ce que sa vie prenne un tournant aussi inattendu. Alors qu’il se promène dans les rues de la ville, il tombe nez à nez avec un distributeur de billets qui refuse de lui rendre sa carte bancaire. Désemparé, il décide de suivre les conseils d’un passant et se rend au café du coin pour attendre que la situation soit résolue.
C’est là qu’il fait la connaissance de Marie, une jeune femme passionnée de voyage et de découverte. Malgré leur différence d’âge et de caractère, ils finissent par sympathiser et se rendent compte qu’ils ont beaucoup de points communs. Alors que leur conversation dérive sur le sujet du hasard, Marie lui confie qu’elle a l’habitude de suivre ses instincts et de laisser le hasard guider ses décisions.
Inspiré par cette philosophie, Thomas décide de se laisser aller lui aussi et de voir où le hasard le mènera. Il accepte l’invitation de Marie à se joindre à elle pour un voyage en Amérique du Sud et découvre ainsi un monde qu’il n’aurait jamais imaginé. Grâce à cette aventure imprévue, il découvre une passion pour la photographie et finit par trouver un emploi dans un magazine de voyage.
Le hasard fait bien les choses, comme on dit, et c’est grâce à lui que Thomas réussit à trouver sa voie et à réaliser ses rêves les plus fous.